Frontière Irlande-Royaume-Uni

Dates de création de la frontière : 1921 ; tracé actuel en 1925
Longueur de la frontière : 360 km
Régions concernées : en Irlande du Nord : Districts de Newry, Mourne et Down ; Armagh, Banbridge et Craigavon ; Mid Ulster ; Fermanagh et Omagh ; Derry City et Strabane - en Irlande : Comtés de Donegal, Leitrim, Cavan, Monaghan, Louth

Programme(s) européen(s) :

Cette frontière terrestre de 360 km marque la séparation entre l'Irlande et le Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande du Nord.
Le tracé frontalier débute à "Lough Foyle" (l’estuaire de la rivière Foyle), au Nord de l’île et s’étend jusqu’à "Carlingford Lough" (estuaire de la rivière Newry et de son canal) sur la côte est de l’île, au bord de la mer d’Irlande. Malgré les conflits qui ont entouré la frontière, cette dernière est considérée comme une "frontière ouverte" et son franchissement est possible sans restriction en raison de la Zone de circulation commune ("Common Travel Area") entre le Royaume-Uni et l'Irlande.
La région frontalière est majoritairement rurale et peu peuplée. La création de la frontière a séparé certaines villes de leurs marchés et de leurs arrière-pays historiques.

Historique

Lors de sa création, il s’agissait d’une frontière interne au Royaume-Uni de Grande Bretagne et d’Irlande. En effet, en 1921, pour appliquer le "Government of Ireland Act 1920", qui avait vocation à instaurer le "Home Rule" (l’autonomie interne) en Irlande, le Parlement britannique crée deux juridictions sur l’île, chacune avec son propre parlement : l’Irlande du Nord, composée de six des neuf comtés de la province historique d’Ulster ; et l’Irlande du Sud, comprenant les trois comtés restants d’Ulster et les trois autres provinces.

Avant la mise en place effective de ces deux régions autonomes, le Traité anglo-irlandais est signé le 6 décembre 1921, mettant fin à la Guerre d’Indépendance irlandaise et créant l’Etat libre d’Irlande. Le lendemain, le parlement de l’Irlande du Nord exerce ses droits dans le cadre du traité en décidant de ne pas appartenir à l’Etat libre d’Irlande, et ainsi la frontière régionale se mue en frontière nationale.

Dans le cas d’une telle décision du parlement de l’Irlande du Nord, le traité anglo-irlandais prévoyait une commission de la frontière (Irish Boundary Commission), et celle-ci est créée en 1924 pour adapter le tracé frontalier aux souhaits des habitants. Plusieurs modifications sont proposées mais aucune n’est adoptée et la frontière est finalement formellement établie en 1925, telle qu’elle avait été tracée en 1921.
Les gouvernements irlandais et britannique se sont ensuite disputés la souveraineté de "Lough Foyle" et de "Carlingford Lough" où la frontière terrestre devient frontière maritime. Ce désaccord n’est toujours pas résolu, mais ne suscite plus de revendications actives. Par ailleurs, ces deux estuaires sont désignés comme "zones humides d'importance internationale" dans le cadre de la Convention Ramsar, et leur préservation est gérée par un organisme de coopération Nord-Sud, la "Loughs Agency", en vertu de l’Accord du Vendredi saint (voir ci-dessous).

La création de la frontière a parfois été tenue pour responsable de la mauvaise situation économique de la région frontalière. Ainsi, la forte militarisation de la zone pendant la guerre civile irlandaise (1922-1923) et la présence de barrières de sécurité et de routes barrées ont eu un fort impact sur l’ensemble de la région ; et la frontière est devenue un "marqueur" de la cristallisation de ce conflit.
La coupure, matérialisée par la frontière, a participé à la réduction des liens sociaux et économiques des régions et communautés qu’elle a isolées les unes des autres. Elle a occasionné de nombreux déplacements de population pendant les Troubles (conflit nord-irlandais), exacerbant les difficultés identitaires.

Coopération transfrontalière

Malgré l’impact du conflit sur la frontière, qui a longtemps découragé son franchissement par les frontaliers, le commerce s’est peu à peu développé dans la région ; il a constitué le premier phénomène réellement transfrontalier. A partir de 2008, le nombre de ménages vivant en Irlande et faisant leurs courses en Irlande du Nord a régulièrement augmenté. Aujourd’hui, près de 250 000 ménages font régulièrement leurs achats en Irlande du Nord.

L’Accord du Vendredi saint (également "Accord de Belfast", officiellement "Accord de Paix pour l’Irlande du Nord") de 1998 a instauré des mécanismes de coopération institutionnelle Nord-Sud dans plusieurs secteurs (éducation, transports, agriculture, santé, environnement, tourisme) et également dans le cadre de nouvelles structures transfrontalières de mise en œuvre (cours d’eau, commerce et développement d’entreprises, promotion de la sécurité alimentaire, communautés linguistiques, programmes européens de financement, aquaculture, phares et tourisme marin).


Les programmes européens de coopération :

Trois programmes opérationnels permettent de financer la coopération transfrontalière entre l'Irlande et le Royaume-Uni :

  • Le programme opérationnel "Royaume-Uni - Irlande" pour la paix et la réconciliation (PEACE IV) a pour objectif principal de restaurer la paix entre les communautés. Le lourd passé historique et les nombreux conflits qui ont eu lieu dans la zone frontalière justifient cet objectif spécifique.

  • En plus de la frontière entre l'Irlande et l’Irlande du Nord, le programme opérationnel "Irlande du Nord, région frontalière de l’Irlande et Ouest de l’Ecosse" couvre la frontière maritime avec l’Ecosse. Il vise à développer une région transfrontalière plus prospère, notamment en mettant l’accent sur la recherche et l’innovation. Pour ce faire, la préservation de l’environnement est une autre priorité.

  • Quant au dernier programme opérationnel, "Irlande - Pays de Galles", il ne concerne pas la frontière terrestre mais la frontière maritime qui existe entre l’Irlande et le Pays de Galles. Ce programme met l'accent sur l’innovation, le transfert de connaissances et le changement climatique.


Les deux premiers programmes sont gérés par le "Special EU Programmes Body" (SEUPB), une structure transfrontalière créée dans le cadre de l’Accord du Vendredi saint.


De nombreux organismes favorisent la coopération transfrontalière irlando-britannique :  

Le Centre for Cross Border Studies, situé à Armagh et à Dublin, opère de nombreuses recherches et travaille au développement de la coopération sur la frontière, notamment dans les domaines de l’éducation, de la santé et de l’information des citoyens. Le Centre identifie les problèmes propres à la région frontalière et organise des réunions au cours desquelles les enjeux identifiés sont approfondis et discutés. Il soutient également les différents réseaux transfrontaliers et encourage ainsi la coopération à de multiples niveaux.

Le Centre international pour le développement local et régional (ICLRD) est également très impliqué dans la coopération transfrontalière irlando-britannique. Parmi ses multiples objectifs il souhaite surtout promouvoir ses activités de recherche en partenariat avec les programmes universitaires et porter assistance aux gouvernements locaux pour mettre en place différentes actions de terrain. Les experts de l’Université de l’Ulster, de l’Institut technologique d’Athlone, de l’Institut pour le développement urbain ou du Centre for Cross Border Studies participent tous à ces travaux qui aspirent à créer des partenariats entre les secteurs de la santé, de l’économie, du logement…

En complément, un service gouvernemental directement destiné à la population a été mis en place. Appelé "Border Ireland", il propose une base de données en ligne mettant à disposition un nombre très important d’informations transfrontalières à l’usage des populations. Ce site recense de nombreux articles et recherches, fournissant une information très complète.

Il existe d'autres services administratifs mis en place par les deux gouvernements, comme un forum parlementaire Nord-Sud créé en 2010 qui organise des conférences et des réunions de groupes de travail sur des problématiques transfrontalières. De la même manière, un forum consultatif Nord-Sud a été mentionné lors d’une réunion ministérielle. Visant à réunir des membres de la société civile de l’Irlande du Nord et du Sud, il reste actuellement à l'état de projet.

La coopération transfrontalière s’organise parallèlement autour de plusieurs réseaux qui réunissent villes et collectivités. Les trois réseaux les plus connus sont les suivants :
- le réseau de la zone frontalière d’Irlande centrale (The Irish Central Border Area Network-ICBAN),
- le groupe transfrontalier du Nord-Ouest (North West Region Cross Border Group),
- la région frontalière Est (East Border Region).

Plus localement, les progrès de la coopération transfrontalière se sont récemment traduits avec la création de l’agglomération transfrontalière de Newry-Dundalk. Ces deux villes, situées à l’extrémité Ouest de la frontière, ont concrétisé leur situation de "villes jumelles" par deux rapports publiés en 2006 et 2009. En mars 2011, cette situation a été renforcée par un Mémorandum (étendu en 2014) mettant l’accent sur le tourisme, les loisirs et le développement durable. L'agglomération transfrontalière vise à créer une "nouvelle forme de gouvernance régionale au-delà des structures de gouvernement traditionnelles locales et centrales" comme l’a déclaré Mick Murphy, maire de Newry.


Projets de territoire et organes institutionnels de la coopération

Coopération transfrontalière au niveau local

Newry-Dundalk