Société civile

Historique

l'origine des microprojets dans les règlements européens

En décembre 1998, la Commission Européenne a présenté le Règlement du fonds de préadhésion PHARE pour la Coopération transfrontalière (2760/98) afin de donner un cadre clair pour les activités de soutien à la coopération transfrontalière en Europe Centrale et Orientale. Le règlement incluait une référence spécifique à la mise en place d’un fonds pour microprojets (« Joint Small Project Fund », JSPF) dont l’objectif était de renforcer l’inclusion et l’implication des acteurs locaux et régionaux dans la coopération transfrontalière. Ce fonds visait donc à augmenter les capacités des acteurs locaux frontaliers pour l’identification des besoins locaux et la mise en œuvre d’activités à petite échelle dans une période relativement courte. Les Eurorégions des PECO obtiennent dès la fin des années 1990 de participer à la gestion de ces fonds PHARE pour ce qui concerne le volet de la coopération transfrontalière. Depuis le début, une des tâches des Eurorégions est ainsi de gérer les coopérations bilatérales transfrontalières financées par INTERREG. Ainsi, dans le cadre du Joint Small Project Fund, des projets people-to-people ont commencé à être financés pour un montant allant jusqu’à 50 000€. Le montant dédié au JSPF était d’environ 10% des moyens financiers totaux du programme chaque année. En 1999, le programme de pré-adhésion PHARE a consacré 183 millions d’euros à la coopération transfrontalière, dont  113.3 millions d’euros à des grands projets d’infrastructure et 17.5 millions d’euros aux fonds de microprojets. En 2000, l’enveloppe globale destinée à la coopération transfrontalière par PHARE était de 163 millions d’euros. Dans chaque pays, le fonds pour microprojets représentait entre 10 et 20% des montants dépensés.

L'ÉMERGENCE DES ACTIONS "PEOPLE-TO-PEOPLE" EN EUROPE OCCIDENTALE

Concernant l’UE17, les microprojets sont mentionnés pour la première fois dans le rapport d’évaluation d’INTERREG de la période 2000-2006. Selon ce document, le programme INTERREG IIIA a eu un rôle positif sur les apprentissages interculturels entres les citoyens frontaliers, notamment à travers des “umbrella initiatives” soutenant les microprojets transfrontaliers dans les domaines de la culture et de l’intégration sociale (des fonds pour microprojets). Les programmes Autriche-Slovaquie, Øresund, Vlaanderen-Pays Bas et PAMINA ont ainsi mis en place un fonds dédié. Dans ce rapport, le “People-to-people activities” de PAMINA est mis en avant pour son approche innovante de financement des microprojets qui a permis, avec des moyens financiers limités, de générer des résultats nombreux et tangibles à une échelle très locale. Le projet “People-to-people activities” a été mis en place pour la première fois entre 2002 et 2004, et dans une deuxième session entre 2004 et 2006. Un fonds de microprojets a ensuite été établi pendant les périodes de programmation suivantes (2007-13, actif depuis 2009 ; 2014-2020, actif depuis 2017). Aux frontières françaises, l’Eurodistrict Regio PAMINA a donc été pionnier dans la mise en œuvre des microprojets. Ces expériences ont inspiré la multiplication des initiatives en soutien de microprojets, notamment dans les programmes INTERREG France (Manche)-Angleterre, France-Wallonie-Vlaanderen et Grande Région.

La réappropriation du concept par les territoires

La première apparition des microprojets, dans le cadre du fonds de pré-adhésion pour les pays d’Europe Centrale et Orientale, affichait comme objectif le renforcement des capacités des acteurs locaux et de la société civile frontalière. Dans un contexte d’Etats post-totalitaires, la société civile n’était pas organisée, ni mobilisée, et les acteurs locaux n’avaient aucun pouvoir décentralisé puisque tout était encadré par le parti et l’Etat. De plus, les frontières ont été assez mobiles en Europe Centrale et Orientale, laissant des minorités nationales hors du sol national et des tensions entre les pays, réanimées lors des recompositions territoriales (après les guerres mondiales et la chute du communisme). Dans les premiers rapports annuels de PHARE, les microprojets sont salués de façon positive car ils permettent de rendre les fonds de pré-adhésion visibles et tangibles auprès du citoyen et de petites réalités locales, et d’encourager les échanges entre les citoyens frontaliers plus mobilisés, plus inclus dans la démocratie locale. Réapproprié par l’Eurodistrict PAMINA, l’objectif des microprojets est « de contribuer au développement d’une identité du Rhin Supérieur ». Aujourd’hui, les microprojets font l’objet d’une gestion libre des autorités compétentes dans la cadre de chaque programme INTERREG. Aux frontières françaises, les fonds de soutien à ces microprojets varient quant aux domaines, à la durée et aux montants, mais le trait commun est l’objectif déclaré de créer ou renforcer un sentiment d’appartenance commun, une identité commune, une idée de citoyenneté (trans-)frontalière partagée dans ces territoires. L’objectif des microprojets semble donc avoir été réapproprié par des acteurs et des territoires qui les adaptent à une histoire et un contexte très différents de ceux de l’Europe Centrale et Orientale de la fin des années 1990.