La parole aux députés frontaliers français

joël Giraud, député des hautes-alpes

« Le territoire transfrontalier, champ d'expérimentation de projets partagés, périmètre possédant une culture commune, zones à enjeu pour l'emploi ou les échanges de biens ou de personnes, est un facteur essentiel pour démontrer les réalités et les plus que peut apporter l'Europe. Mais la coopération transfrontalière est trop souvent condamnée à des compromis qui ne permettent pas aux citoyens concernés d'avoir la perception des projets qui y sont menés car ils perdent souvent une partie de leurs ambitions initiales, leur lisibilité, voire leur caractère pérenne.

Le problème majeur demeure la concrétisation de projets partenariaux. Les difficultés, qu'elles soient juridiques, fiscales, administratives, empêchent souvent les partenaires de concrétiser des projets ayant vocation à renforcer l'unification des territoires et relèvent le plus souvent des administrations de chaque Etat concerné.
Ces projets étant bien souvent oubliés dans les campagnes politiques, le débat électoral est l'occasion de renforcer la citoyenneté européenne en promouvant les actions transfrontalières réalisées avec l'appui, notamment, des fonds européens.

Les élections européennes pourraient être l'occasion de sensibiliser les candidats et futurs parlementaires aux difficultés rencontrées sur les territoires transfrontaliers car il faut s’engager à travailler à homogénéiser les processus décisionnels à tous les niveaux de partenariat. La monnaie unique, la libre circulation des biens et des personnes, un développement économique partagé, n'auront de sens que s'il y a une réforme collective et progressive des systèmes institutionnels, juridiques et fiscaux, qui sont aujourd'hui distincts puisque fondés sur des décisions nationales différentes.

En ce qui concerne le département des Hautes-Alpes, frontalier de l’Italie, deux récentes opérations exemplaires peuvent être mises en avant :

  • le projet « Star Bene » géré par le CODES 05 (Comité départemental d’Education à la Santé 05) qui a permis notamment la mise en réseau des acteurs de santé (échanges de savoir-faire en matière de méthodes et modalités d’intervention dans les territoires, la formation des professionnels de santé, l’information des publics-cibles) ;
  • le programme transfrontalier Montviso : la Réserve de biosphère du Montviso, projet développé par les parcs régionaux du Pô Cuneese (Piémont) et du Queyras (Hautes-Alpes) a été reconnue comme "Réserve de biosphère transfrontalière" par l'UNESCO. Cette reconnaissance a permis au territoire transfrontalier de devenir la 13ème réserve de biosphère transfrontalière au monde, le 28 mai 2013.

D’autres dossiers sont en cours d’élaboration et un réel besoin se fait sentir dans le secteur de la santé publique où une véritable coopération transfrontalière entre les hôpitaux de Susa (Italie) et de Briançon (Hautes-Alpes) permettrait non seulement de garantir la pérennité de ces structures et des emplois mais également et surtout d’optimiser l’offre de soins proposée à la patientèle de ce territoire transfrontalier  (le vivier de médecins et de patientèle est important du côté italien).

La difficulté de faire l'Europe est la même, que ce soit à Bruxelles ou sur le terrain.
Il faut désormais aller vers un renforcement de la connaissance de l'autre, exploiter les acquis, les conforter pour montrer à tous les habitants des réalisations concrètes et pérennes.
Le territoire transfrontalier est sans aucun doute le laboratoire, le champ d'expérimentation sur lequel peuvent s'appuyer les parlementaires européens pour construire une Europe plus forte, vers l’Europe fédérale que j’appelle de mes vœux. »