Emploi

Sommaire

Introduction

Les migrations de travailleurs frontaliers constituent l’élément géographique le plus tangible et le plus spectaculaire de la réalité transfrontalière. On considère qu’un travailleur est frontalier quand il réside dans un pays, travaille dans un autre et rejoint son domicile au moins une fois par semaine. Cependant, la nature du déplacement n’est pas univoque. Par exemple, les statistiques institutionnelles européennes ne prennent pas forcément en compte la proximité géographique. En 2015, Eurostat dénombrait 2 millions de travailleurs frontaliers dans l’UE, dont plus de 20% vivant en France1. Selon un rapport du Commissariat général à l’égalité des territoires de novembre 2017, la proportion des actifs européens travaillant à l’étranger est assez faible (0,9% de la population active), cependant cette proportion augmente très fortement dans les régions frontalières. C’est par exemple le cas de la Province de Luxembourg en Belgique où 27,3% des actifs déclarent travailler à l’étranger, ou encore dans l’ancienne région française de Lorraine où les travailleurs frontaliers représentent 12,2% des actifs.

Concernant les frontières françaises, selon ce même rapport, le nombre de travailleurs transfrontaliers français (traversant quotidiennement une frontière pour aller travailler) s’élève à 438 000 personnes. La Suisse demeure la première destination avec 170 300 navetteurs, suivie du Luxembourg (70 300) dont le nombre de travailleurs frontaliers résidant en France a quadruplé depuis 1990, de l’Allemagne (46 000), la Belgique (37 800) et Monaco (26 200). Les flux de travailleurs transfrontaliers vers l’Espagne et l’Italie sont en revanche beaucoup plus faibles, du fait d'emplois et rémunérations moins attrayants et un relief montagneux rendant l’accès plus difficile, et ne sont pas pris en compte dans l’étude. Ainsi selon l'étude Empleo réalisée par l’Eurorégion Nouvelle Aquitaine-Euskadi-Navarre (Programme Interreg POCTEFA, décembre 2017), le territoire de la région Nouvelle-Aquitaine compte 3 863 travailleurs transfrontaliers résidant en France et allant travailler en Espagne, dont 86% sont de nationalité espagnole. Concernant l’Italie, seulement 316 travailleurs frontaliers résidant dans les Alpes-Maritimes travaillent en Italie (chiffre de 2010 actualisé par la MOT). Il est à noter que la frontière franco-italienne est la seule frontière où il y a plus de flux de travailleurs en direction de la France que de flux au départ du versant français. Dans le cas de la frontière maritime avec le Royaume-Uni, les flux sont aussi relativement faibles, avec moins de 300 travailleurs vivant dans l’ancienne région Nord-Pas-de-Calais allant travailler au Royaume-Uni.

Les flux des pays voisins vers la France sont quant à eux nettement inférieurs, l’Insee estime que le flux entrant correspond à 30 000 personnes en 2011.
Il est intéressant de noter la nette évolution du nombre de travailleurs frontaliers depuis les 30 dernières années et plus particulièrement entre la fin des années 1990 et aujourd’hui. Le chiffre des travailleurs frontaliers entrants sur le territoire français est resté remarquablement stable entre 1999 et 2011 (après avoir longtemps décliné notamment en provenance de Belgique et d’Espagne) alors que celui des sortants est passé au cours de cette période de 248 400 à 353 000 entre 1999 et 2011, soit une augmentation de 42% en 12 ans, et à 438 000 aujourd’hui selon Eurostat. Ce déséquilibre croissant peut résulter de plusieurs facteurs : faible attractivité des zones frontalières françaises par rapport aux pays voisins, mais également la présence de pôles d’emploi importants proches de la frontière, la majorité des navetteurs est, en effet, concentrée dans un nombre limité de zones d'emploi (Bâle, Genève, Luxembourg, Monaco…).


  1. Source : EUROSTAT, Labour Force Survey, 2015